jeudi 5 novembre 2009

Poésie : un prix de découverte

L'association "Poésie-Rencontres 12", ex "association des Écrivains du Rouergue", organisatrice des Journées-poésie de Rodez depuis 1952, souhaite en 2010 renouveler ses actions autour du prix Ilarie Voronca (prix destiné à un jeune poète ayant pas ou peu publié). Son objectif reste le même : faire connaître et soutenir la poésie contemporaine.

Composition du jury : Michaël Glück, Président. Gérard Bocholier. Fabienne Courtade. Emmanuel Laugier. Cédric Le Penven (prix Voronca 2004). Hélène Sanguinetti.Un lecteur choisi par l'association (non encore nommé).

Le prix consiste en l'édition du manuscrit par l'éditeur Jacques Brémond. Il sera proclamé en mai et entraînera la participation à une journée poésie à Rodez, en octobre, ainsi que l’invitation l’année suivante à une résidence d’écriture en Aveyron.

La date limite de l'envoi pour le Prix Ilarie Voronca 2010 est le 8 mars 2010.
Pour obtenir le règlement complet, s’adresser à Sidonie Chevalier, par courriel : http://poesie.rencontres.12@gmail.com ou par téléphone : 06 82 76 43 90.

mercredi 28 octobre 2009

Le MOTif, Observatoire du livre et de l’écrit en Ile-de-France, vient de mettre en place pour ses adhérents, acteurs de la chaîne du livre, une assistance juridique gratuite.

Un avocat spécialisé en droit de la propriété littéraire et artistique et en droit des affaires, répond par téléphone aux questions sur le droit applicable au livre et à sa commercialisation

Comment utiliser ce service :
§ Adhérer au MOTif : http://www.lemotif.fr/fr/le-motif/devenir-membre/
§ Envoyer sa question par courrier ou courriel : juridique@lemotif.fr au MOTif en précisant ses coordonnées téléphoniques. Cette question, si elle concerne un aspect contractuel, doit porter sur une partie (une clause) du contrat et non son intégralité.
§ Le MOTif convient avec la personne de la date et de l’heure du rendez-vous téléphonique.
Si le traitement de la question est complexe voire requiert l’intervention d’un avocat, l’adhérent a le choix de poursuivre la consultation à ses frais avec l’avocat du MOTif ou tout autre avocat de son choix.

Pour en savoir plus : http://www.lemotif.fr/fr/le-motif/assistance/
Contact : catherine.sas@lemotif.fr

jeudi 15 octobre 2009

Le Conseil Permanent des écrivains organise une table-débat :


Formation professionnelle,
un droit pour les auteurs aussi



Lundi 23 novembre 2009, de 18h00 à 20h00 à la SGDL


Depuis la loi sur la formation permanente de 1971, on reconnaît à tout français, salarié ou travailleur indépendant, le droit de se former tout au long de sa carrière afin de s’adapter à son métier, mais plus encore afin d’évoluer et se développer professionnellement. Or les artistes auteurs ne peuvent encore à ce jour accéder à ce droit, faute de dispositif juridique approprié.

Depuis une dizaine d’années, des organisations d’auteurs, dont le CPE, réclament l’instauration d’un régime de formation professionnelle au profit des artistes auteurs.

Depuis 2009, la région Île-de-France a décidé d’une expérimentation sur la formation professionnelle des auteurs (écrivains au sens large) dans le cadre de ses opérations, promotions sociales et sécurisation des parcours professionnels, avec le soutien de la SACD, de la SAIF et de la SOFIA.
Le ministère de la Culture a commandé une étude permettant d’évaluer les conditions dans lesquelles un dispositif d’accès à la formation continue pourrait être mis en place au profit des artistes auteurs.


Où en est-on du droit à la formation professionnelle permanente des auteurs ?
Quelles en sont les pratiques actuelles ?

SUR INVITATION UNIQUEMENT !
Dans les locaux de la SGDL : Hôtel de Massa, 38 rue du Faubourg Saint-Jacques, 74014 PARIS
Renseignements et invitation : Sophie Béhar - 01 40 51 04 01 - info@conseilpermanentdesecrivains.org

ADELF ATLF COSE CALCRE LA CHARTE SACD SGDL SNAC SACEM UNPI UGS UdE SELF EAT SAIF

En partenariat avec La Culture avec la Copie Privée www.copieprivee.org et avec La Sofia www.la-sofia.org

dimanche 6 septembre 2009


Manifeste de la pensée insoumise

Dans les journées qui ont suivi le 12 juin de la grande machination électorale, à Téhéran, une balle des miliciens bassidji a tué au coeur la jeune philosophe Neda Agha Sultan.
Elle était simplement parmi les manifestants, dont la protestation “considère comme illégitime tout gouvernement qui ne respecte pas la volonté du peuple”, comme vient de le dire l’ayatollah Montazéri, jadis successeur désigné de Khomeini, le fondateur de la République iranienne. Là où “la confiance est perdue”, où “nous avons tous perdu dans cette élection”, selon les termes de l’ancien président de la République, Rafsadjani, actuel président du Conseil des experts qui a élu l’actuel Guide suprême Khamenei. Il est entendu en effet maintenant que 31 millions de voix seraient allées à l’opposition : 19 à Moussavi et 12 à Kharoubi – contre 6 millions à Ahmadinejad.
Qui est Neda Agha Sultan ? Une jeune femme qui travaillait “sur Descartes, Nietzsche, Avicenne”.
Descartes : le nom qui signifie l’exploration de la puissance infinie de la pensée, découverte au cœur du doute.
Nietzsche : le projet qui explore le mouvement de la transvaluation de toutes valeurs, entrepris par “la mise en garde devant tout événement”. Et pour qui le devenir est “plus profond et plus métaphysique que l’être”.
Avicenne, Ibn Sina : le penseur persan, le grand philosophe-médecin du Traité de la Shifâ, de la Guérison, percevant la ‘métaphysique’ comme la discipline de la pensée qui, plutôt que de survenir ‘après la physique’ - comme l’indique la racine de ce mot grec transcrit passionnément en arabe - doit intervenir avant l’exploration de la science, comme un préliminaire critique.
Ainsi le soulignait avant lui déjà Alfarâbi, l’énigmatique philosophe persan ou turc de langue arabe né au coeur de l’Asie, dont Avicenne découvrait à Boukhara déjà, en manuscrit, le bref et étincelant “Essai sur la métaphysique” : comme la pensée de la définition ou de la limite.
Or l’appel des manifestants prend maintenant des formes nouvelles. Ainsi en célébrant le quarantième jour depuis la mort de Neda Sultan, le 30 juillet, qui était aussi l’anniversaire de la mort de Sohravardi, le philosophe et poète de la pensée qui fut executé en 1191 sur l’ordre du fanatisme. Neda signifie l’appel, en persan. Son nom est désormais l’appel à la lutte contre la tyrannie du ‘Guide” qui a pris finalement parti pour un ‘président’ faussement élu.
Contre la tyrannie, l’intolérance et la bêtise, sont appelés tous les démocrates du monde. Les journées qui se succèdent depuis le 20 juin prennent la forme d’un appel permanent “contre un islam rigoriste et idéologique”. “Contre mensonge, violence et répression”.
Neda est aujourd’hui devenue à Téhéran le symbole de la liberté et de l’espoir dans l’avenir. Elle demeure le symbole d’un Iran qui vient. Face à l’Iran du pouvoir d’aujourd’hui, appuyé sur des milices tueuses et des services secrets, soutenus à l’étranger par ceux du FTB de Poutine, experts en meurtres camouflés et en police anti-émeutes. Ainsi dans les manifestations du peuple iranien, on entend le cri de : “mort à Poutine !”.
– Moins de vingt jours après la violence qui tue Neda à Téhéran, une autre forme de la violence vient frapper et aveugler, à Montreuil, en France, le 8 juillet, le jeune cinéaste Joachim Gatti, petit-fils du grand créateur de théâtre, Dante Armand Gatti. Certes il ne manifestait pas contre l’élection faussée d’un président, mais simplement contre l’expulsion d’un pacifique squat d’immigrés.
Quand la maire de Montreuil, Dominique Voynet, a questionné la sécurité de Saint-Denis sur ce tir meurtrier par flash ball, le haut gradé des services policiers a donné cette réponse, cette ‘justification’ sans doute à ses yeux : “en Iran la police tire sur les manifestants”...
Sous la violence du tir et la douleur, le visage ensanglanté, Joachim Gatti est jeté à terre. “Cinq d’entre nous ont été blessés et j’ai perdu un œil.” Il ajoutera : “Il m’en reste un, et la détermination à continuer.”
Depuis 2002 l’usage du flash ball est autorisé, et la police de proximité a été supprimée, au grand renforcement des ‘forces de l’ordre’. L’effet clair, bientôt ne fut-il pas le déferlement des voitures brûlées ? Mais le flash ball ? Est-ce devenu le symbole, ‘adouci’ pour l’usage ’occidental’, de la violence d’Etat ?
La démocratie trop policière serait-elle au fanatisme totalitaire ce que le flash ball dans les yeux est à la balle au coeur ?
Mais en antithèse, ce que les splendides trilogies dramatiques de Dante Gatti – Le Poisson Noir, La vie d’Auguste G., Sacco Vanzetti, réfléchies dans La Parole errante – seraient au grand triptyque philosophique qui était cher à Neda : Descartes, Nietzsche, Avicenne, prolongé par Sohravardi.
A travers le triptyque que travaillait Neda, dans Téhéran soudain enflammée par la provocation du mensonge électoral, le monde entier peut désormais entendre le propos cinglant du Zarathustra nietzschéen : “l’Etat, c’est le plus froid de tous les monstres froids, il ment froidement, et voici le mensonge qui suinte de sa bouche : moi, l’Etat, je suis le peuple..”
Le visage de Neda dessine la limite où un peuple cesse de supporter le mensonge d’Etat.

Jean Pierre Faye
1er août 2009

mercredi 27 mai 2009

LES DROITS DERIVES NE DOIVENT PAS PARTIR A LA DERIVE

Les contrats d’édition comportent le plus couramment la cession par l’auteur à l’éditeur, outre celle du droit de publier un ouvrage sous forme imprimée, celle des droits dits annexes ou dérivés : droits de traduction en toutes langues, de représentation, d’adaptation, de reproduction et d’exploitation par enregistrement mécanique ou magnétique ainsi que tous procédés visuels, auditifs ou informatiques, à l’exception des droits d’adaptation audiovisuelle. Rappelons que ces derniers, si l’auteur accepte de les céder à l’éditeur de son ouvrage imprimé, doivent obligatoirement faire l’objet d’un contrat séparé, la répartition des sommes qui en proviennent étant à négocier.
Pour les droits dérivés autres qu’audiovisuels, l’usage, en cas de cession à un tiers, est de répartir par moitié entre l’auteur et l’éditeur les sommes nettes perçues par ce dernier. Cette règle s’applique à la cession à un tiers des droits numériques : numérisation de l’ouvrage entier commercialisé sous forme de e-book ou consultable à distance, en tout ou en partie.
Si l’éditeur choisit d’exploiter lui-même les droits numériques, il en va autrement ; un contrat séparé doit être signé et le pourcentage des droits décidé d’un commun accord.
Il y a donc lieu pour l’auteur de bien distinguer entre les deux formes d’exploitation des droits numériques de son livre : soit l’éditeur s’en charge lui-même, et il aura à s’entendre avec l’auteur sur les conditions d’un contrat spécifique, soit il cède à un tiers ce droit d’exploitation numérique, et les sommes nettes qu’il en retirera seront à partager par moitié entre l’auteur et lui-même, conformément au contrat signé pour l’édition de l’ouvrage.
Il semblerait qu’un flou règne à ce sujet dans les propositions faites par certains éditeurs à leurs auteurs. L’Union des écrivains appelle donc à la vigilance. Les auteurs doivent veiller à ce que leurs contrats prévoient le partage par moitié des sommes nettes perçues par leur éditeur sur tous les droits dérivés cédés à des tiers, quelle que soit la nature de ces droits : traduction en langues étrangères, reproduction, dont la photocopie, représentation, enregistrement par tout procédé, numérisation de l’ouvrage entier, adaptation en tout ou en partie dans une œuvre numérique, incorporation de l’ouvrage dans une collection numérique (dans le cas d’abonnements à des « bouquets »).
Rien, dans l’économie actuelle de l’édition, ne justifierait l’augmentation de la part de l’éditeur sur les droits dérivés.
Union des écrivains

jeudi 16 avril 2009

Le numérique :
À livres riches, @uteurs pauvres ?


TABLE RONDE ORGANISÉE PAR LE CPE, LE 14 MAI
18H30 - 20H00 - au MOTif (Observatoire du livre et de la lecture en Ile-de-France)

Avec Christophe Caron, Cory Mac Cloud, Olivier Jouvray, Constance Krebs ...
Modération : Karine Papillaud, journaliste


Pour créer des oeuvres numériques adaptées aux nouvelles pratiques de lecture, il ne suffira pas d’aligner des contenus, texte, image et son : le débat placera l’auteur au centre des projets d’enrichissement numérique des livres !
Avec le numérique, les relations des auteurs avec les éditeurs, et les droits des auteurs, dont le droit moral, vont-ils devenir virtuels ? Y aura-t-il des contrats séparés, et sous quelles conditions, pour l’oeuvre numérique d’un côté, pour le livre imprimé de l’autre ?
Comment s’assurer que les méta-données, nécessaires au catalogage d’une oeuvre, et dont le nombre est multiplié par l’enrichissement numérique, seront compatibles ? Faut-il appeler à la création d’une société de gestion collective de l’exploitation des oeuvres numériques ?
Ces questions devront être abordées avec les éditeurs qui demeureront les garants de la qualité éditoriale des oeuvres dématérialisées qu’ils publieront, de la fi abilité de leurs contenus, et de leur disponibilité sur la toile. Un dialogue entre organisations d’auteurs et les éditeurs autour des « usages » liés à l’édition et à la diffusion d’une oeuvre numérique devrait s’instaurer.
Et comme toujours, il reviendra aux pouvoirs publics de concevoir et de mettre en oeuvre une politique du livre et de la lecture – en ligne, cette fois.

Le MOTif - 6, Villa Marcel-Lods - Passage de l’Atlas, 75019 Paris - 01 53 38 60 61
Renseignements : Sophie Béhar - 01 40 51 04 01
LA POÉSIE FORTIFIE LA LANGUE


Au dernier salon du livre de Paris, le Mexique était à l’honneur. Parmi les écrivains invités deux poètes indiens étaient présents, Briceida Cuevas Cob et Juan Gregorio Regino. La première écrit en maya, le second en mazatèque. Dans les diverses régions du pays, des écrivains indiens publient dans leur langue natale.
Depuis une vingtaine d’années, au Chiapas, existe un mouvement culturel impulsé par des hommes et des femmes mayas et zoques, conscients de la nécessité de revendiquer et valoriser leur identité.1
S’étant rendu compte de la fragilité de leur histoire, de leur culture, due au fait que leur langue est uniquement orale, certains se sont mis à la tâche d’un véritable sauvetage en récoltant les légendes, les prières, les témoignages, et en inventant une langue écrite.
D’autres également, s’apercevant que leur langue s’appauvrissait, ont entrepris d’écrire des récits, des poèmes. Et à la question « pourquoi écrivez-vous en langue indienne ? » la réponse récurrente de tous les poètes a été : pour fortifier ma langue.Ces poètes sont tous des militants. Ils ne baissent pas la tête. Leurs exigences se sont fait entendre dans les accords de San Andrés de 1996. Ils sont la voix, les porte-parole de ces Indiens, qui depuis la conquête espagnole, il y a presque cinq cents ans, ont été opprimés, et en but à un racisme qui ne s’est jamais atténué jusqu’à maintenant. Leurs coutumes, leur religion, ils n’ont jamais cessé de les pratiquer au nez et à la barbe des colonisateurs d’abord, puis des mestizos (métis) issus de ces colonisateurs.
Ils ont résisté en silence, mais ils ont gardé leur âme indienne intacte. Il suffit de les côtoyer pour se rendre compte que les grandes idées mayas sont toujours là, très présentes. Les poètes, les écrivains, se sont mis en devoir de faire vivre dans leur langage écrit toute la tradition orale des Mayas, mais en s’inscrivant et en s’engageant dans une littérature contemporaine.
Ils sont convaincus qu’un peuple sans connaissance artistique est un peuple marginalisé, avec peu de possibilité de développement social, et que la pluralité culturelle du Chiapas est synonyme de richesse. Ils écrivent dans leur propre langue, pour les Indiens, et traduisent eux-mêmes en espagnol, pour que les Mexicains se rendent compte qu’ils existent, qu’ils ont une histoire, une culture, eux aussi. Ils écrivent pour que leur peuple grandisse.
Voici ce que m’a dit un de ces poètes, Alberto Goméz Pérez : « Notre lutte est une lutte de classe. Une lutte de marginaux, d'exploités. En écrivant dans notre langue, en dehors du fait que c'est un droit pour lequel nous luttons, c'est surtout notre identité que nous sommes en train d'imposer dans l'histoire de notre pays. Celui-ci méprise les langues indiennes. Le racisme des métis a bloqué pendant longtemps l'avancée et le développement de ces langues. Je connais mon peuple, et j'en fais partie. Je suis nourri de sa culture. C'est elle qui a développé la partie intellectuelle de mon existence.
Nous, les Indiens, nous parlons tous notre langue. Mais le fait, pour moi, d'écrire en tzotzil, est quelque chose de beaucoup plus fort. En l'écrivant, je la nourris, je la fortifie. Je n'écris pas pour me sentir Indien, je suis Indien. Je n'ai pas coupé les racines qui viennent de mes ancêtres. Je suis Indien, donc j'écris en langue indienne. C'est ma raison d'être. Nous avons notre propre histoire, notre propre religion, notre propre politique, notre propre mentalité. Tout cela nous appartient, et ma lutte est de le faire passer dans ce que j'écris. Les grandes idées des peuples mayas, dont la religion, sont fortement vivantes dans le langage et dans la tradition orale. »
J’ajouterai juste quelques mots sur le nahualisme, base de leur religion.
Les nahuales hantent littéralement la pensée des Indiens, comme leur corps. Et, bien sûr, chaque poète en est imprégné.
Nous sommes tous composés essentiellement d’os et de viande, et d’un ensemble d’âmes, ou nahuales, toutes installées à l’intérieur du cœur. Le terme d’âme est bien sûr une simple convention, qu’il ne faut pas prendre dans le sens chrétien du mot.
En tzotzil, le nahual se dit ch’ulel, et peut se traduire par l’autre du corps. À titre d’exemple, le ciel se traduit par l’autre de la terre. Cet autre du corps se compose de trois classes d’êtres :
a) un minuscule oiseau, ou oiseau du cœur ;
b) le ch’ulel proprement dit, que l’on appelle l’authentique ch’ulel, pour le distinguer du terme générique d’âmes ;
c) les lab.
L’oiseau du cœur
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C’est un être tout petit, que la plupart du temps on imagine comme une poule pour les femmes et un coq pour les hommes. Il est absolument nécessaire pour vivre. Il ne peut, ne doit abandonner le corps, sinon celui-ci tombe malade, et meurt.
Cependant cet oiseau du cœur est la proie très convoitée d’une certaine classe d’êtres, les pále, une espèce de lab, c’est à dire une autre entité animiste des Indiens. L’oiseau du cœur est un être craintif et étourdi, responsable des palpitations du cœur. En effet lors d’une émotion, ou d’un effort du corps, il s’agite et halète. Quand le corps meurt, l’oiseau est libéré dans le monde, où il sera dévoré par les pále, ou par quelque animal sauvage.
L’authentique ch’ulel.
Il se trouve également dans le cœur, et lui aussi est nécessaire à la vie, mais en plus il intervient dans la caractérisation individuelle de chaque personne. C’est dans le ch’ulel que réside la mémoire, ainsi que les sentiments et les émotions. Il est responsable des rêves, et c’est en lui que prend naissance le langage. Il habite à la fois dans le cœur, et dans une montagne. Tout ce qui existe dans cette montagne est ch’ul, c’est à dire sans substance tangible.
Le ch’ulel s’évade du corps pendant le sommeil. Au cours de ses divagations extérieures, il peut être capturé et séquestré par un lab ou par un seigneur de la montagne, qui habitent sous la terre. Le corps alors finit par mourir si le ch’ulel n’y retourne pas dans un temps raisonnable.
Les lab.
Ce sont des animaux de toutes espèces, des éclairs, des vents… On possède au moins un lab, et treize au maximum. Ils confèrent un pouvoir individuel, mais peuvent aussi occasionner des risques considérables. Ils sont à l’intérieur du cœur (d’où ils peuvent sortir lorsque le corps dort, et en général ce n’est pas pour faire du bien) et à la fois disséminés à la surface du monde. On ne les maîtrise pas.
Oui, ces Indiens Mayas résistent en silence depuis la conquête espagnole. Lorsque le 12 juillet 1562, l’évêque espagnol Diego de Landa fit mettre le feu à tous les livres sacrés des Prêtres du soleil, sur la place de Mani, il croyait anéantir leur religion. Mais comme il est écrit dans Les Prophéties du Chilam Balam, « Ce savoir est venu jusqu’à nous malgré le bûcher des Espagnols, malgré la rage destructrice des hommes. » En faisant détruire les textes sacrés des Mayas, il a au contraire permis à la parole des Mayas d’entrer dans la légende. Les prêtres, qui ont été témoins de l’autodafé, ont essayé de réécrire les livres hiéroglyphiques en utilisant l’alphabet des conquérants. Ainsi sont nés Les prophéties du Chilam Balam et le Popol Vuh. C’est grâce à ces ouvrages que le monde maya est encore présent. Grâce à eux les Indiens actuels sont encore imprégnés par cette voix, lointaine, énigmatique, qui leur parle du temps inscrit dans le ciel, de ce lien qui les unit, qui unit l’homme depuis ses origines au destin de l’univers.
François PERCHE
1 L’Intrait d’Union a donné dans son numéro 51, page 2, quelques poèmes de poètes indiens du Chiapas.